Les herbicides du groupe 4 regroupent les herbicides de type phytohormones de synthèse (ou régulateurs de croissance) et incluent les familles d’herbicides telles que les auxines synthétiques (phytohormones synthétiques ou acides phénoxy-carboxyliques), les acides benzoïques et les acides pyridiniques-carboxyliques. Ces herbicides sont absorbés prioritairement par le feuillage mais aussi par les racines. Ils peuvent s'accumuler dans les zones de division cellulaire intensive (méristème, bourgeon, racine) et sont transloqués dans la plante via le xylème et le phloème. Ce groupe d’herbicides affecte la balance hormonale et la synthèse des protéines (et autres constituants cellulaires), entraînant une perturbation de la division cellulaire et de l’élongation, ce qui se traduit par une croissance anormale de la plante (ou malformation).
Plus en détail, les symptômes de phytotoxicité suivant un traitement avec ce groupe d’herbicides sont successivement : un léger flétrissement des tissus dans les minutes qui suivent et des courbures épinastiques et, en quelques heures, l’arrêt de la croissance. Il y aussi formation de cals (partie durcie causée par la prolifération de cellules méristématiques secondaires) et apparition de fasciations (phénomène tératologique par lequel certains organes cylindriques s’aplatissent ou développent un nombre élevé d’appendices). L’activité des méristèmes primaires est inhibée contrairement à celle des méristèmes secondaires : la croissance des racines primaires s’arrête et quelque fois leur extrémité gonfle alors qu’il y a initiation de racines secondaires.
À de fortes concentrations, les herbicides de type hormonaux montrent une activité « de contact ». Il y a brunissement, dessèchement et nécrose des tissus végétaux touchés. Ceci limite la migration de l’herbicide dans la plante et diminue son efficacité agronomique. Parce que les herbicides hormonaux se déplacent dans la plante et que leur action s’exerce sur certaines synthèses biochimiques, la température conditionne de façon importante leur activité herbicide. À des températures élevées, l’activité métabolique des végétaux est intense de même que le transport des herbicides hormonaux vers leurs sites d’actions. Cette activité assure aux herbicides un effet maximal alors qu’à de basses températures, le métabolisme végétal est ralenti et l’effet herbicide peut être presque nul.
Plusieurs populations de mauvaises herbes résistantes aux herbicides du groupe 4 ont été retrouvées aux États-Unis; quelques populations au Canada (gaillet bâtard (
Gallium spurium), ortie royale (
Galeopsis tetrahit), kochie à balai (Kochia scoparia), centaurée du Rhin
(Centaurea stoebe), moutarde des champs (Sinapis arvensis) et
carotte sauvage (Daucus carota)) mais aucune espèce n’a été trouvée résistante au Québec.
Cas 2,4-D - Le 2,4-D est un herbicide organique dont l’usage dans le monde est très répandu, depuis plus de 60 ans. Il fait partie de la famille des acides phénoxy-carboxyliques. Il peut être utilisé sous forme ester (ex.: IPCO 2,4-D ester 700, Attain XC B, etc.), amine (ex.: 2,4-D amine 500, Dyvel DSP, etc.) ou sel de choline (ex.: GF-3335, Enlist Duo, etc.). Il est homologué dans plusieurs cultures : les céréales, le maïs, les graminées fourragères, l’asperge, la fraise et la framboise, la canneberge, les arbres fruitiers et le gazon. Les formes variées du 2,4-D sont absorbées autant par les racines que les feuilles. Les racines absorbent plus rapidement les sels d’amines que les formes esters : c’est l’effet contraire pour les feuilles. Le mécanisme d’action du 2,4-D n’est pas totalement élucidé mais ressemble à celui des autres herbicides de type auxinique. L’herbicide est absorbé par les feuilles et migre vers les méristèmes via le phloème principalement. Les symptômes de phytotoxicité se rapportant au 2,4-D sont : des déformations (épinastie) de la tige et des pétioles, un renflement (au niveau des nœuds) et une élongation anormale de la tige, et des feuilles en forme de cuillère. Un jaunissement des points de croissance, une inhibition de la croissance, le flétrissement et la nécrose des tissus sont souvent observés. Les espèces sensibles peuvent mourir dans un délai de 2 à 4 semaines. À de faibles concentrations, les jeunes feuilles paraissent plissées et effilées, avec une nervation parallèle à la nervure centrale.
Le 2,4-D est potentiellement mobile mais est rapidement transformé dans le sol ou absorbé par les racines des plantes.
La résistance des plantes au 2,4-D a été rapportée chez plusieurs mauvaises herbes dans le monde. Aux États-Unis, des populations résistantes ont été trouvées chez : l’
amarante tuberculée (
Amaranthus tuberculatus), la petite-herbe-de-l’eau (
Commelina diffusa), la
carotte sauvage (
Daucus carota), l’
amarante de Palmer (
Amaranthus palmeri), la
laitue scariole (
Lactuca serriocola) et le
plantain lancéolé (
Plantago lanceolata). Au Canada, deux espèces ont montré de la résistance :et la
moutarde des champs (Sinapis arvensis) et la
carotte sauvage (Daucus carota)
. Aucune espèce n’a été rapportée résistante au 2,4-D au Québec.
Cas MCPA – Le MCPA peut être utilisé sous trois formes (forme de sels, ester ou amine) afin de lutter contre la plupart des mauvaises herbes à feuilles larges. Il s’agit d’un herbicide systémique qui est absorbé rapidement par les feuilles ou les racines. La forme ester du MCPA pénètre plus rapidement la cuticule que les formulations amine ou sels. La forme ester est peu soluble dans l’eau mais se dissous rapidement dans l’huile ou les solvants organiques. Cette forme est plus volatile que les autres formes, et donc plus sujette à la dérive. Le MCPA est homologué dans plusieurs cultures : céréales, maïs, graminées fourragères, asperge, fraise et framboise, canneberge, arbres fruitiers et gazon. Il est appliqué en post-levée. Il est absorbé par les feuilles et migre via le phloème vers les méristèmes. Il compte parmi les herbicides les plus mobiles de la famille des acides phénoxy-carboxyliques. Les symptômes de phytotoxicité se rapportant au MCPA incluent : des déformations (épinastie) de la tige et des pétioles, un renflement (au niveau des nœuds) et une élongation anormale de la tige, et des feuilles en forme de cuillère. Il s’ensuit un jaunissement des points de croissance, une inhibition de la croissance, le flétrissement et la nécrose des tissus. Les espèces sensibles peuvent mourir dans un délai de 3 à 5 semaines suite à l’application de l’herbicide. À de faibles concentrations, les jeunes feuilles paraissent plissées et effilées, avec une nervation parallèle à la nervure centrale.
Le MCPA est faiblement persistant dans les sols mais très mobile et susceptible d’être lessivé : il pourrait être entraîné dans les eaux sous-terraines.
Des populations de mauvaises herbes résistantes au MCPA ont été confirmées un peu partout dans le monde : aux États-Unis, une population de
laitue scariole (
Lactuca serriocola) et au Canada, la
moutarde des champs (Sinapis arvensis) ainsi que l’
ortie royale (
Galeopsis tetrahit). Aucune espèce n’est résistante au Québec.
La phytotoxicité par les auxines synthétiques (ou acides phénoxy-carboxiliques) peut être confondue avec d’autres phytotoxicités causées par les herbicides appartenant aux acétanilides, aux acides benzoïques, aux imidazolinones, aux sulfonylurées, aux dinitroanilines et aux thiocarbamates. On peut aussi confondre avec les dommages causés par l’application d’insecticide au sol, l’encroûtement du sol, une plantation trop ou peu profonde, la compaction du sol ou les nématodes.
Pour diminuer les risques de phytotoxicité, il faut éviter les dérives sur les cultures lors de l’application, utiliser des jets dirigés au besoin, ne pas appliquer par temps venteux, respecter les consignes inscrites sur l’étiquette et bien nettoyer le pulvérisateur.